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Le journaliste et essayiste Akram Belkaïd, auteur de Retours en Algérie, analyse les institutions algériennes, l'absence du président Bouteflika, la situation économique du pays et ses relations avec la France.
Auteur : MediapartTags : Algérie Médiapart Akram Belkaïd Envoyé : 08 juillet
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Dans son dernir livre « Retours en Algérie » Akram Belkaïd nous parle d’une Algérie trop souvent négligée. Une Algérie contemporaine, encore jeune, et dramatiquement fragile. Une Algérie de moins de 50 ans, exposée nue et sans gloire aux pieds d’une histoire déjà lointaine, majestueuse et gigantesque, achevée en feu d’artifice absolu dans le firmament d’un 20 ème siècle pourtant chargé d’épisodes.
Une histoire sublimée par l’accession flamboyante à l’indépendance d’une nation neuve, triomphante et fière, vers laquelle les exploités – on dira indignés aujourd’hui, se tourneront comme vers un exemple à suivre. Une trajectoire jadis enseignée dans les écoles du monde entier. Une histoire dont le narrateur est le fils privilégié, comme des millions d’algériens nourris aux promesses d’un destin prestigieux, et dont il va courageusement contourner tous les poncifs et certitudes congelées pour se préoccuper d’une histoire nettement plus contemporaine où il va concentrer l’essentiel de ses observations sur l’édification quotidienne et méthodique d’un immense gâchis constaté au coin de chaque rue.
Une séquence courte de 50 ans donc, saisie l’espace d’un retour et atténuée par le regard de ses accompagnateurs globalement plus vieux d’une génération et porteurs d’un contre-point interrogatif et souvent intéressant. Une séquence qui fourmille de sincères émotions, échappées de lieux oubliés ou rendus méconnaissables, et qui sont autant de pudeurs pour masquer la dureté d’un regard qui ne pardonne rien aux ravisseurs de rêves d’une génération passée en quelques années du statut de peuple élu des dieux à celui de bannis et de harragas. Une génération témoin des prodiges d’une pierre antiphilosophale, qui change l’or en plomb, les rêves en cauchemars, les champs des possibles en interminable ennui.
Des émotions d’où perce la colère toute méditerrannéene d’un passionné qui cache ici une réflexion objective dont il est également capable, et que ses lecteurs connaissent bien.
Des lecteurs qui se reconnaitront sans peine dés les premières pages du livre, dans ses descriptions et dégoûts d’une société déréglée, minée par la nullité et embarquée dans une folle trajectoire que rien ne semble pouvoir arrêter ; A Tlemcen, Oran, Alger ou Constantine, les anecdotes affluent et répètent toutes, sous différentes formes, la même consternation. Pittoresques et souvent drôles, les péripéties de ces retours sont contées avec chaleur par un homme ô combien sensible au caractère particulier et immédiatement attachant de l’Algérien, de son caractère fantasque, de sa bonté jamais feinte, de sa folie même. Elles témoignent à chaque fois du déchirement profond de l’homme arraché à sa terre et ne renforcent que plus une colère d’autant plus grande qu’elle sait la révolte compromise, suspendue à des lendemains porteurs d’hypothèses encore trop nombreuses.
Cette émotion pourtant, c’est le signe révélateur d’une énergie toujours disponible qui parcourt également le corps d’un peuple encore enfant et qui n’attend maintenant que le moment de pouvoir s’exprimer. Cette émotion c’est l’espoir d’une fierté qui sera un jour retrouvée. Un jour où l’Algérie pourra à nouveau embrasser son présent sur la bouche et retrouver ainsi les vrais rails de son destin d’exception.
Retours en Algérie, Akram Belkaïd, Carnets Nord, 2013
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Une histoire sublimée par l’accession flamboyante à l’indépendance d’une nation neuve, triomphante et fière, vers laquelle les exploités – on dira indignés aujourd’hui, se tourneront comme vers un exemple à suivre. Une trajectoire jadis enseignée dans les écoles du monde entier. Une histoire dont le narrateur est le fils privilégié, comme des millions d’algériens nourris aux promesses d’un destin prestigieux, et dont il va courageusement contourner tous les poncifs et certitudes congelées pour se préoccuper d’une histoire nettement plus contemporaine où il va concentrer l’essentiel de ses observations sur l’édification quotidienne et méthodique d’un immense gâchis constaté au coin de chaque rue.
Une séquence courte de 50 ans donc, saisie l’espace d’un retour et atténuée par le regard de ses accompagnateurs globalement plus vieux d’une génération et porteurs d’un contre-point interrogatif et souvent intéressant. Une séquence qui fourmille de sincères émotions, échappées de lieux oubliés ou rendus méconnaissables, et qui sont autant de pudeurs pour masquer la dureté d’un regard qui ne pardonne rien aux ravisseurs de rêves d’une génération passée en quelques années du statut de peuple élu des dieux à celui de bannis et de harragas. Une génération témoin des prodiges d’une pierre antiphilosophale, qui change l’or en plomb, les rêves en cauchemars, les champs des possibles en interminable ennui.
Des émotions d’où perce la colère toute méditerrannéene d’un passionné qui cache ici une réflexion objective dont il est également capable, et que ses lecteurs connaissent bien.
Des lecteurs qui se reconnaitront sans peine dés les premières pages du livre, dans ses descriptions et dégoûts d’une société déréglée, minée par la nullité et embarquée dans une folle trajectoire que rien ne semble pouvoir arrêter ; A Tlemcen, Oran, Alger ou Constantine, les anecdotes affluent et répètent toutes, sous différentes formes, la même consternation. Pittoresques et souvent drôles, les péripéties de ces retours sont contées avec chaleur par un homme ô combien sensible au caractère particulier et immédiatement attachant de l’Algérien, de son caractère fantasque, de sa bonté jamais feinte, de sa folie même. Elles témoignent à chaque fois du déchirement profond de l’homme arraché à sa terre et ne renforcent que plus une colère d’autant plus grande qu’elle sait la révolte compromise, suspendue à des lendemains porteurs d’hypothèses encore trop nombreuses.
Cette émotion pourtant, c’est le signe révélateur d’une énergie toujours disponible qui parcourt également le corps d’un peuple encore enfant et qui n’attend maintenant que le moment de pouvoir s’exprimer. Cette émotion c’est l’espoir d’une fierté qui sera un jour retrouvée. Un jour où l’Algérie pourra à nouveau embrasser son présent sur la bouche et retrouver ainsi les vrais rails de son destin d’exception.
Retours en Algérie, Akram Belkaïd, Carnets Nord, 2013
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